
C'est Tartempion. Vous le connaissez, c'est celui qui est sur l'entête de mon blog. C'est le nain dans notre salon que Garde nous a donné. Brie-mon-chien-Bree ne l'aime pas beaucoup (enfin, je ne sais pas si ça changé). Je crois qu'elle voit en lui un signe de hargne et d'hubris... Moi je pense que ca représente bien l'ensemble de mon oeuvre. Sinon, l'image fait p'tit bonheur "Monsieur ramassez-moi, chez vous amenez-moi. Mes frères m'ont oublié, je suis tombé, je suis malade... Si vous n'me cueillez point, je vais mourir, quelle ballade. Je me ferai petit, tendre et soumis je vous le jure. Monsieur je vous en prie délivrez-moi de ma torture..." Yah sure...
Vraiment surréelle ma journée. Comme cette photo que je trouve décevante en petit... (En gros, il y a un milliards de détails)... Je me lève... 10h... (bon, ok, 12h30), je m'énerve. Me dit que je dois relire mon texte (encore) avant d'aller le porter... J'ai comme un lien avec ce texte qui m'empêche de me séparer. Il n'est pas tout à fait prêt. Il n'est pas tout à fait à terme... J'angoisse bref. Alors j'écoute un peu de musique... Je tombe sur "Monopolis" et je pense à mon chum qui me chante "Jocelynopolis". Je souris bêtement. Le jour est gris, la nuit est tourmentée (je fais encore des rêves étranges où j'incarne d'autres personnes que moi. Qu'on me redonne mes rêves !) Je n'ai pas d'étoiles sur la peau, mais quelques taches de rousseur. Il pleut à Besançon paraît-il. Je me trouve stupide d'avoir complètement oublié pendant un mois le nom de Louise. Je n'ai pas de déjeuner intéressant. Je m'arrange de confiture de fraise, de tranches de pomme et de Port Salut (meilleur qu'au Canada). Ma chambre est un foutoir et ma vie est en suspens.
Il me reste trop de choses à faire avant de partir, trop de choses à faire pour corriger le reste de ma journée, de ma vie. Je relis une dizaine de pages au hasard. Ça va. Je tombe sur la phrase "La fin et l'ennui les hantent." On dirait que mon livre me parle. Ce n'est pas la performance qui me fait angoisser. La performance ne me fait pas peur. Non pas que je crois mon livre exceptionnel, ou à l'inverse infecte. L'honneur, c'est pour les braves. Je n'ai pas écris ce livre pour montrer ma bravoure, mon érudition, ma supériorité. Je ne l'ai écrit que pour partager un discours. C'est un post de flâneries et autres kétaineries, sur un ton pseudo-savant (pour reprendre l'expression d'une correctrice), de presque 200 pages. C'est un livre sans prétention, écrit par un gars prétentieux. Je suis prétentieux car j'ose me croire plus hot que ceux qui se prennent au sérieux en ne me prenant pas au sérieux. Non, j'angoisse seulement de l'envoyer, car ça marquera la fin.
Alors j'ai gravé mon CD, et je suis parti au 7 rue de l'École Polytechnique, comme c'est marqué sur mon contrat. J'ai mis mes beaux habits, dont ma chemise d'intellectuel élégant, et mes beaux souliers de perroquets dans lesquels j'ai mis des semelles à 40 euros la paire !!! (calvaire)... J'arrive au 7, et je ne me perds pas dans le cinquième (c'est la première fois !) une musique de Pierre Lapointe aux oreilles. J'entre, et c'est le foutoir. Je ne comprends pas, c'est la section "Littérature". Je suis inquiet. A-t-on placé mon livre à l'extérieur de la science ? J'ai envie de m'enfuir. Une secrétaire, sort la tête de sa pile de manuscrits. C'est bien, on semble trier les manuscrits contrairement à ce que disent certaines langues sales. Je lui explique la raison de ma présence en m'excusant de ne pas avoir annoncé ma présence. Elle m'envoie au 16 rue des Écoles... J'avais presque oublié que j'étais en France.
Je vais mon chemin jusque là, sans me perdre. Le 16 affiche ses couleurs "Asie, Afrique, Amérique du Sud, Moyen-Orient, Océanie" heu... Bref, tout sauf "Occident"... Mais qu'est-ce que je fous ici ? Je ne veux pas laissé mon livre à ces gardiens du savoir. L'endroit ne m'inspire pas. Et je saute d'effroi : sur la porte, il y a une affiche d'un spectacle, "Le jardin des horreurs" où l'on voit un nain de jardin avec un couteau qui le fracasse le crâne... C'est surréel. Je recule. Qu'est-ce que ce signe ? Pourquoi là ? Pourquoi maintenant ? Qu'est-ce que ça veut dire ? Fucké en chien... C'est comme too much pour moi. J'ai plein d'idées qui me viennent en tête : c'est un signe ! UN SIGNE ! "Avez-vous été contacté ?" Oui ! Mais j'ai pas compris le code ! Ça m'a dit un "Go !" Mais un "go away ?" ou un "go ! go ! go !"
J'ai entré, en me disant que c'était un nain avec un couteau dans la tête sur une porte. Que ça ne voulait rien dire, que je cherchais juste à me dire quelque chose en tentant de l'interpréter. J'avais peur de laisser mon livre voler de ses propres ailes, il fallait que je coupe sévèrement le lien entre moi et le nain de jardin, quitte à assassiner mon oeuvre. Le nain avec un couteau dans la tête ne voulait donc rien dire... Mais I saw the sign...
À l'intérieur, j'ai eu d'autres angoisses... J'ai vu ces montagnes de livres cordés et malheureux, comme un orphelinat chinois. C'était un endroit miteux, le plancher était sale, les gens étaient affairés à autres choses qu'à m'aider... Il n'y avait pas d'espaces. C'était un lieu de production de savoirs complètement déjanté, sans aucune structure, sans aucune règle. Les tablettes classaient les livres un peu n'importe comment, les livres étaient laids et dépareillés. Il n'y avait aucune cohérence... C'était un foutoir, comme ma chambre, comme ma tête.
Puis, je m'y suis un peu reconnu... Là, on y faisait la promotion de la diversité. Tous les pays avaient le droit de parole, avaient le droit à la connaissance. Toutes les idées circulaient, un peu tout croche, mais elles circulaient... Les chercheurs venus pour acheter trouvaient leur casier et ils s'extasiaient de leur découverte. je sais pas pourquoi je parle au pluriel, je n'ai vu qu'un type sur les plantes médicinales africaines qui a trouvé un plein casier de livres sur le sujet et qui semblait comme un enfant dans un magasin de bonbons. J'ai vu ça comme un signe. Mon livre voulait aller jouer avec ses amis et moi je ne voulais pas.
J'ai parlé à une fille qui ressemblait à la réalité... Elle ressemblait surtout à la chanson "Léa" de Louise Attaque... Je lui pose deux ou trois questions sur le contrat. Je constate que L'Harmattan, c'est une usine. Ils en ont vu de toutes les couleurs. Je suis dans le temple du relativisme, où personne nous écoute vraiment. Elle était contente que j'ai marqué le numéro du dossier sur le CD de données... Je suis un numéro. Je regarde mon CD, et le trouve presque beau dans ce décor lugubre. Je veux le ramener chez moi et m'excuser de l'avoir amené loin...
J'explique alors à la fille, qui n'est pourtant pas graphiste, que je veux absolument que mes titres soient tous en lettres minuscules et je veux que les plus importants occupent les espaces inférieurs, pour insister sur l'idée du petit... Je l'ai même marqué sur la pochette. J'ai l'air totalement idiot, à insister sur ce détail, en complet, dans un espace minable, comme si la qualité de mon oeuvre et de leur édition reposait là-dessus. Dès lors, je comprends, à moindre échelle, les mamans inquiètent qui surévaluent l'importance de l'heure des siestes, de la composition du menu, des jeux préférés de leur bébé, etc. Dans le fond, c'est à moi que je parle. J'essaie de me convaincre que tout ira bien, en mon absence et que mon livre saura s'émanciper sans moi. J'espère avoir pris la bonne décision, non pas de maison d'édition, mais de l'éditer.
C'est la fin de ma tutelle et le début d'une vie indépendante pour mon livre. J'ai cédé mes droits.
J'ai surtout cédé des liens intensément intimes avec cet objet. Ces menus détails sont comme les derniers petits liens qui m'unissait à lui et prennent alors des proportions giganteques ! Et si vous voyez des majuscules à mes titres et des occupations en haut de page, vous saurez que je me sens trahi, dépossédé de mon oeuvre. Je maudirai alors L'Harmattan, jusqu'à m'attacher à leur porte et crier aux passants que cette maison est une violeuse d'auteurs et une perverse qui se plait à toucher de pauvres manuscrits sans défense... et dans le fond, qu'est-ce que ça change ?
La réalité m'a alors enlevé mon CD, sans doute pour accélérer le processus de séparation... J'ai été bon, je l'ai pas retenu en disant "SPSS ! Ne le touche pas" en la menaçant d'une banane (vous comprendrez en lisant mon livre). J'ai signé le contrat en me disant tragiquement que même si je me faisais fourré, l'important c'était le bonheur de Tartempion... J'ai signé, comme un grand traité de paix, la fin de mes hostilités intérieures. Aujourd'hui est un petit jour pour tous les nains de jardin ! D'ailleurs, le nain avec le couteau dans la tête avait l'air souriant quand j'ai fermé ma porte. Il ne sera pas torturé en vain.
Mais le prix a payé était lourd. je me sentais vide. Vide et dépossédé. J'avais le sentiment d'avoir été dérobé. Comme si je n'avais plus rien de valeurs, comme si je ne valais plus rien. Je devais faire le deuil d'une partie de moi-même. J'avais un vide existentiel. J'étais confronté à ma propre phobie (j'ai la phobie du vide, vous ne saviez pas ?). Dans ces occasions, je me ramasse toujours à errer. C'est vraiment twit comme moyen de défense. J'erre. Je ne flâne pas, j'erre. Mes écouteurs crachaient un silence qui me pourrait me percer les tympans. Je n'entendais plus rien. Je marchais... Je ne pensais à rien, j'alignais les pas. C'est vraiment dangereux, car j'oublie par exemple de regarder des deux côtés de la rue. Et, je fais toujours ça quand j'ai un vide, c'est vraiment étrange : je prends au hasard un moyen de transport et je sais pas où je vais me ramasser. Je me fais conduire et ça me berce, ça me rassure.
Alors je me suis ramassé dans la 10... Et je ne savais pas où j'allais, je ne savais pas dans quelle direction j'allais... Surréel comme sensation. Puis, il y a Pierre Lapointe qui s'est mis à chanter dans mes écouteurs "Maman dis-moi pourquoi, les oiseaux au fond de mon coeur, à toutes les minutes pleurent, comme si c'était pour les consoler." Ça m'a comme sorti d'un rêve éveillé. Je me suis levé d'un bon et j'ai sorti du métro pendant que les cloches sonnaient. J'ai regardé le nom de la station, et j'étais à Odéon (en fait, je crois que je savais inconsciemment que je devais sortir pour aller prendre la 4... mais c'est un peu surréel comme absence...) J'ai pris la 4 vers porte d'Orléans vraiment confus... rendu à destination, j'étais encore confus... de mon absence, du contrat, de l'endroit où je me trouvais et là, devant moi s'est érigé un signe clair : un gros Sous-marin Subway avec une grosse carte marqué "Vous êtes ici" (et Subway est là...)
Subway n'avait jamais aussi bien dit.... Peu importe on était où, il y aurait un Subway... Et Merde, j'étais à Paris, j'avais signé mon premier livre (car il y en aura certainement d'autres) et finalement, je me mourrais sans doute juste de faim. (d'où le vide intérieur). Pourquoi ne pas célébrer au Subway (une célébration à hauteur de nain) ! Alors j'ai suivi le signe, et je suis allé manger là, un bon gros 12 pouces aux boulettes avec extra cheese en trio avec un coke et des bescuits aux noix de Macadam (traduction française : un 30 centi aux mitteballes supplément de fromage, en menu avec un coca et un cookie Macadémia Blanc)
Ça tellement fait du bien... Mais c'est un peu fucké les signes... Car en sortant, je suis allé faire mon épicerie, et il y avait sur Général Leclerc à côté du bureau de tabac une tornade de billets de loteries... Encore là, vraiment surréel comme situation... (on aurait dit comme avec mon chum, à notre première rencontre, quand on a croisé sur Saint-Jean une avalanche de photos pornagraphiques gais... Vraiment surréel ça aussi... ma vie dude est surréelle, mais aujourd'hui... plus) Mais c'est pas le plus fucké de ma journée...
Je fais mon épicerie. Et je pense à mon post. Je décide de le faire sur l'absurdité de la vie, le vide existentiel, et les symboles qui donnent un sens à la vie. La vie est absurde, c'est nous qui doit lui trouver un sens... On peut prendre tout comme des symboles, surtout quand on sent un vide, car il y a urgence de remplir ce vide... Ces moments de vide sont une occasion où on est sans doute plus sensible, plus ouvert, à la réception, à "être contacté". Je parle pas d'un contact extérieur, mais intérieur. Un déclic qui se fait dans notre tête pour que tout devienne clair. On est alors touché par la lumière. Et c'est ça, finalement, la magie...
Devant les fraises à 1,5 euros le casseau, je me suis rappeller un dessin animé pour enfants/jeunes ado que j'avais écouté une bonne journée quand j'avais Télétoon dans mon appartement à Sainte-Foy... Une phrase m'avait frappé de pertinence : "La réponse est dans les prunes." C'était très bien fait, le p'tit gars se demandait s'il devait troquer sa chance de devenir le petit copain d'une jolie fille assise à côté de lui dans sa classe (quelqu'un voulait changer de place) contre une carte à jouer (style cartes magiques) super puissante qui lui aurait rapporté beaucoup de cartes. Alors son génie consultant lui avait dit cette phrase... Alors il alla consulter le tas de prunes à l'épicerie (créant une secte adoratrice de prunes, très comique), jusqu'à ce qu'il réalise que la valeur des prunes pouvaient chuter dramatiquement, comme ladite carte... Alors il choisit de conserver sa place et tenter sa chance avec la fille...
La réponse est donc aussi dans les fraises à 1,5 euros... La réponse est partout... Le sens est partout... Nos vies ne sont pas insensés, elles prennent le sens qu'on leur donne. Et quand il n'y en a plus, comme dans le cas où on atteint notre objectif et on se retrouve à chercher un nouveau sens, bien on doit en trouver un autre. Sinon, on erre. La vie a un sens, juste à réécouter "I saw the sign" d'Ace of Basse et on voit bien qu'on arrive de loin et donc qu'on est allé à quelque part...
Mais j'arrive à la caisse et la caissière prend les fraises en dernier et elle me demande :
"Les fraises, c'est un euro cinquante ?"
Moi, comme si elle venait de me révéler le sens de la vie, je lui souris et lui réponds "oui"
Alors elle pianote sur son clavier en disant "C'est pas cher, c'est insensé."
8 commentaires:
Je me vois encore déambuler dans le Can Tire de Malbaie à la recherche d'un truc surement innexitant dans ce magasin ( parce que c'est bien connu, au Can Tire de Malbaie, ya absolument rien ), quand mes yeux ont croisé les siens. Il était là, tout poussièreux, à côté de la caissière bête aux cheveux noirs ( tout le monde de Charlevoix connait cette bonnefemme ).Ce petit être sans défense, qui avait l'air de me supplier de le prendre pour toi, mon ami amoureux des petits nains ( de jardin ). Et voilà qu'aujourd'hui, il est à Paris, sur la couverture d'un best seller en devenir...
Ahhhhhhhhhhh! Que la vie nous apporte de belles choses!
Félicitations mon ami, je suis tellement fière de toi!
Bisous xxx
Félicitations Jo! Mais dis donc... T'es vraiment papa-poule avec tes p'tits! Je t'envie d'avoir enfin pondu! T'as pas le sentiment du devoir accompli...? J'ai tellement hâte d'avoir classé mon mémoire sur des tablettes plus ou moins bien cordées et d'arrêter de revenir là-dessus...je t'envie follement! Moi je dis : fête ça un peu, et plus prétentieusement qu'au Subway! ;)
En passant...trop génial cette affiche à la maison d'édition! elle existe vraiment? Dans le contexte, on ne pouvait trouver mieux pour te faire freaker! ahah...pauvre JOcelyN!
Cath
Et moi j'entends Tartempion: "Maman, dis moi pourquoi, tout ce qui bouge autour de moi, me donne juste envie de pleurer, comme le jour où j'suis sorti d'toi". Aujourd'hui mon Jo je te conseil l'écoute de Coeur de Pirate qui te dis: " Et rappelle-toi que tu peux avoir le monde à tes pieds si tu te laisses pas abattre par ceux qui te laissent de côté."
Je suis fière de toi Jo et très heureuse de ton accomplissement, tu devrais l'être aussi.
"Je m'en vais bientôt et je pense très très fort à toi pendant que mes doigts au piano jouent tout ce que je te dois"
xxxxx
Évidemment, je veux également te féliciter d'avoir accompli ce que moi aussi, comme Cath-Cath, je traîne à faire... ce fameux livre... je sens que la postface sera particulièrement savoureuse...
Mais en fait, je voulais surtout te dire que personnellement, c'est l'un de tes meilleurs posts!! Vraiment! Il n'était pas particulièrement comique mais oh combien intense...
Mo xx
Je suis d'accord avec Mél, c'est l'un de tes meilleurs posts ! Que d'émotions ! Bravo pour ton livre, ton courage et ta détermination. J'ai tellement hâte de le lire, de TE lire.
Dodo
Ben après tout ces très beaux et émouvants commentaires, que je partage bien évidemment, je ne sais pas quoi te dire. Je ne sais pas quoi rajouter de plus qui serait tellement édifiant...
Bravo !
Je suis fière de toi, mon ami !
Sabri XX
Ça me fait tellement de bien de te lire.
Je te le dis depuis longtemps, mais je te rappel qu'à mes yeux tu es l'incarnation même de l'intelligence!
Love
xoxo
Félicitation pour le livre, nous avons bien hâte de plonger (davantage) dans ton petit monde!
Félicitation aussi à Tartempion, son premier Cover! Il sera désormais la superstar de Lebourgneuf!
Publier un commentaire