2009-01-31

Pause

(sur le ton d'un gars super trop reposé qui s'en va en plus se coucher)

C'est le fun Paris ! Je prend un pause de mon récit sur le kitsch pour vous dire à quel point ça va bien. Je reviens de Berlin, je me suis fait cruizer à l'aéroport (par un agent de contrôle de sécurité), je sais que mon chum m'aime et en plus il vient me visiter bientôt, je perds lentement du poid, j'ai remis un travail chiant, de termine de plus en plus de cours, je dors bien et longtemps, les journées rallongent tranquillement, j'ai de bons amis, j'ai trois beaux défis réalisables si je m'y mets et toute la vie devant de moi. Je suis heureux. Aujourd'hui, je fais une pause pour le constater (à défaut de faire des poses faute de chargeur à batterie).

Magnifique journée ; j'ai éteint mon réveil en me recouchant, faute d'avoir d'obligations... Puis je me suis levé avec un projet : aller manger de la soupe tonkinoise. Et j'avais le goût d'y aller même seul. Alors je suis parti, un air de Mùm (l'album Yesterday was dramatic, today is ok... j'adore le titre, et l'album, et le titre des chansons) dans les oreilles. D'ailleurs, je vais le repartir pour rédiger mon post... Ha ! Messemble que c'est plus facile être heureux avec du Mùm dans les oreilles...

J'ai pris le tram qui avance doucement, il n'y avait pas beaucoup de personnes. J'ai arrêté à Porte d'Italie comme d'habitude... J'ai marché vers Tolbiac et il ne s'est rien passé de particulier. J'ai découvert que c'était le nouvel an chinois. Bonne année la Chine et les ressortissants chinois ! Je suis arrivé au Pho : il n'y avait presque personne... J'ai demandé à être assis dehors... J'ai commandé une grande soupe boeuf saignant avec un extra viande, et elle était parfaite. Dans la rue, des gens fêtaient la nouvelle année. On passait devant moi déguisée (à moitié ou non) en dragon... On tapait sur des tambours. On faisait éclater des pétards. C'était joyeux. J'ai payé et j'ai quitté. 

Sur Tolbiac, comme si on m'attendait, une danse de lions a commencé en face du Paradis Thai (un resto thaïlandais chic que je me suis promis d'aller un jour, je suis sûr que c'est eux qui l'ont commandé). C'est impressionnant, ils ont allumés genre 8 guirlandes de pétards, c'était comme à la guerre. Deux lions mâles (rouge) et un femelle (blanc), incarnés par deux personnes, dansaient sur le rythme ensorcelant de joueurs de cymbales et de tambours (le joueur de tambour faisait en lui seul un très joli spectacle dans tous les sens du terme). C'était magnifique ! J'étais vraiment ému... Il y avait aussi des échanges de symboles, comme le resto qui nourrissait les lions de salade et d'oignons, avec des enveloppes rouges, et qui recevait un oriflamme, et un calendrier pour la nouvelle année... Un spectacle d'une rare profondeur. 

Puis j'ai pris le métro jusqu'à Rambuteau. Là, j'ai croisé un défilé, aussi pour le nouvel an chinois. Le défilé n'avait rien d'exceptionnel, mais j'ai adoré cette rencontre impromptue. Et le contexte ! Que c'est différent le spectateur français. Premièrement, il n'y a pas de barrières. Alors les gens se plantent un peu n'importe où, si bien que les acteurs ont peine à se mouvoir. Et leurs banderoles ne sont pas tendues alors on ne peut pas lire ce qui se passe. Et les gens coupent le convoi ! C'est de la malchance chez nous je crois... Enfin, il y a une bonne centaine de Parisiens qui vont être cursés... C'était fou ! 

Une fois terminé, j'ai mangé des macarons du Pain de sucre... ce sont sans doute les meilleurs de Paris. Enfin, avec mon chum on jouera au test de goût de L'Épicerie... La belle vie quoi...

Puis je me suis rendu paisiblement au Salon du livre des sciences humaines. Un repaire à éditeurs cools. Génial. J'ai trouvé plein d'ouvrages intéressant et jeté mon dévolu sur trois, dont un que je cherchais depuis le début de ma thèse. 

Au retour, j'eus soif et à cette pensée, je suis tombé sur un My Berry... Cher, mais tellement ce qui me fallait...

Et j'ai même pris plaisir à cuisiner mon repas... ce qui est rare... J'étais enfin seul dans la cuisine, je me suis fais une salade chaude (pommes de terre, poireaux, lardons, oignons rouges, champignons, jus de citron, miel et chapelure) avec oeufs au plat... 

Et là je viens de remettre ma proposition pour la Grande rencontre des jeunes chercheurs de la MEC...

Une fichue belle journée.

En espérant que ce type de journées, de belles solitudes, vous sois disponible... J'ai sommeil...

2009-01-29

le kitsch (volume 2)

À Berlin, personne  ne parle anglais. Mais au moins, il y a une volonté de communiquer et c'est ce qui fait en sorte qu'on réussit à mieux se faire servir qu'à Paris... Le Berlinois est détendu, souriant et habillé bizarrement (on pourrait croire qu'il matche avec les hideux bancs du magnifique métro). Bref, le Berlinois s'assume. C'est sans doute pour cela qu'on dirait que 25% de sa population sont des homosexuels... Le Berlinois moyen dégage la même énergie qu'un rimouskien qui a deux bières dans le corps. D'ailleurs, Berlin est un pays (un pays en soi) où on boit de la bière partout. Les femmes chics s'en ouvrent même une petite sur un banc de métro (oui, c'est permis), alors que les jeunes préfèrent les grosses. S'assumer est une attitude à adopter quand on côtoie beaucoup le kitsch. À force de vivre à ses côtés, on doit finir par ne plus se sentir menacé et qui sait, l'accepter... Mais le Berlinois réussit aussi à bien s'en protéger en érigeant contre lui des magnifiques building design pour s'y réfugier quand il passe. C'est dans ce contexte géo-culturel que j'ai mené mon terrain.

Le kitsch aimant les quartiers populaires, j'ai demandé au chauffeur de taxi bête comme ses deux pieds de me conduire directement dans Reinickendorf. C'est au milieu de cette brousse de kétaines sauvages que mes deux peu farouches guides ont implanté leurs quartiers généraux. Coquet je dois dire, l'appartement me confirme que ces deux types savent bien trouver une perle dans dans une botte de marde... 

Parlant de mottes, je vous invite à aller voir sur le profil FB d'Alexandre Fecteau la photo de leur trône à l'envers, avec leur podium à étron... C'est déstabilisant et franchement exotique (je n'oserai pas le dire, mais c'est quasi divertissant... enfin Mathieu, il faudrait t'en procurer une...) Non, mais il n'y a qu'en Allemagne où on apprend à honorer notre caca. Les chiens en font autant... Je ne pensais pas que Paris pouvait être battu en qualité de capitale de la crotte de chien... 

Revenons au kitsch... Le kitsch sauvage se nourrit habituellement de touristes, alors dès le premier matin, nous avons été dans Berlin-Est au Reichstag. On a seulement trouvé des building plutôt sympas et une trop grande lignée de touristes qui s'enfonçait dans un trop beau monument pour contenir le kitsch recherché... Non... Il fallait trouver autre chose. On a erré dans le parc Tiergarten, mais mis à part tous les couples gais qui promenaient leur chien, rien à signaler. C'était même plutôt coquet. J'ai pris cette photographie.
 
Et puis, nous avons décidé de mettre le cap vers une autre section de la ville... Là où il allait avoir magasins et personnes... Nous nous sommes donc rendus à Potsdamer Platz, où il reste des vestiges du mur... Nous aurions dû nous méfier quand nous avons vu l'ambassade canadienne et rebrousser chemin... Car depuis mon expérience parisienne, je sais à quel point le Canada est glamour à l'étranger... Et comme de fait, l'endroit l'est. Surtout sous la cage de verre et d'acier du Sony-Center... Ce design trop intense fait certainement fuir le kitsch, car nous n'y avons même pas trouver une trace...

Nous avons donc été ailleurs... Alexanderplatz était sans doute une meilleure idée étant donné son statut un peu flou. Bon, nous savions que nous n'allions pas trouver de kitsch au théââââtre Volksbühne qui diffuse les pièces expérimentales les plus intenses, sinon peut-être quelques miettes de kitsch à la porte, espérant pouvoir y entrer. Alors nous avons poursuivis notre chemin. Là-bas, nous avons décidé de nous planquer et d'attendre... Dans l'attente, nous avons fait du shopping, mais nous conservions néanmoins espoir de le voir apparaître... Mais non... Et c'est tout de même troublant, car même les souvenirs manquent cruellement de kitsch... La compagnie, hyper design, Ampelmann produit des souvenirs TELLEMENT hot autour des bonhommes des signalisation pour piétons, qu'Alexandre et moi bavions devant les sacoches...
Nous bavions tellement, que nous nous sommes arrêté manger une currywurst (saucisse au curry) trempée dans une sauce rouge qui fait encore objet de discorde. (Selon moi, c'est seulement du ketchup européen saupoudré de curry...) 
Mais cette saucisse n'avait rien de kitsch... elle était même coupée par une machine à couper des saucisses design... alors...

Alors le miracle de cette rencontre entre les deux mondes ne s'est pas produit. Comme le temps pressait, nous avons décidés de changer de stratégie : comme le kitsch est excentrique, fallait-il s'excentrer ? Nous sommes alors allé très très loin, vers une université. Mais Ô Malheur ! Nous sommes tombés sur un quartier de riches... Nous voulions prendre un taxi pour nous dépêcher à quitter les lieux, mais le chauffeur nous a forcé à descendre... (cf. post d'Alexandre, 2009) Alors nous nous sommes ramassés dans une performance théâtrale interactives où le "spectateur" était invité, en allemand, à réfléchir à ses peurs dans son milieu de travail, mais surtout au concept de thérapie de groupe... Nous étions tellement des outsiders... accrochés à une bilingue qui nous traduisait ce qu'elle pouvait, à être là à interagir avec des Allemands (un public composé de 85% de jeunes gais venus là pour cruizer, de quelques filles artistes et d'un vieil alcoolique insupportable) dans de faux ateliers de plus en plus cinglés. Le meilleur, c'est quand on nous a fait fabriquer un "fear-catcher" avec des baguettes et de la laine... Ça m'a tellement rappeler des ateliers que nous forçait à participer une pauvre cinglée qui enseigne pourtant à des doctorants... 

Mais être à ce point excentré nous invite à nous remettre en question, à faire une introspection libératrice... Mais le kitsch n'aime pas cette liberté de conscience. Notre première journée fut donc un échec total en ce qui a trait la rencontre avec le kitsch. Nous sommes donc retournés bredouille.

Suite dans le prochain volume.


  

2009-01-27

Interlude

Cliquez ici pour voir une belle petite vidéo de M. Cool en action. 
En fait, Greg nous interprète à Berlin un segment décousu de "I kissed the girl" de Katy Perry devant le mémorial aux victimes homosexuelles du nazisme. Le mémorial prend la forme d'un bloc en béton, comme un placard trop étanche, où l'on voit dans une ouverture (ouverture vandalisée en août 2008... quelqu'un a tenté de briser la vitre avec un objet) un court film présentant deux hommes qui s'embrassent. Il ne s'agit pas d'un hommage au Bye-Bye 2008, mais d'une réelle célébration de la diversité sexuelle. Ce renversement du genre fait glisser le sens de l'homosexualité non plus à un exotisme agréable, quoique anecdotique, mais à une manière d'être. En prenant le rôle de Trickster, Greg montre que l'hétérosexualité est aussi un construit social. La participation du monument (qui sert aussi accessoirement de repaire à tantouzes) est notable, il rappelle le lourd parcours de l'acceptation à l'échelle individuelle que collective. C'est un peu comme si on réunissait dans un même plan le point A et B, et le point A comme ombre du point B. On sent néanmoins un léger malaise de l'interprète, malaise qui se veut aussi social, car le chemin pour l'acceptation est encore Somewhere over the rainbow. Et sur ce point, le monument rappelle que l'histoire peut se répéter dans l'avenir (je devrais plutôt dire se répète dans le présent, la cicatrice dans la vitre rappelant cette triste réalité), comme s'effondrer à nouveau sur lui. C'est pourquoi il y a nécessité de célébrer ce passage à la lumière, célébrer surtout devant cette ombre, célébrer la diversité sexuelle. Ces homosexuels n'ont pas été assassinés en vain, du moins, si nous prenons au sérieux notre devoir de mémoire. 

2009-01-26

le kitsch (volume 1)

(sur le ton d'un ethnographe classique)

Le kitsch, comme dirait un auteur dont j'oublie le nom, est "[...] une réaction qui n’est pas marquée par un manque de goût, mais par une absence d’inventivité et d’incarnation. [Il] nie l’individualité (et par extension, l’altérité) afin de pouvoir plaire à tout prix à toutes personnes. L’objet ainsi qualifié propose un lieu normalisé à outrance, où le conflit n'a pas sa place, où le réel et l’imaginaire se présentent entiers. [...] C’est pourquoi kitsch est à la fois insulte et compliment : il évoque une utopie aussi charmante que condamnable : seulement l’amour." Le mot est né en Allemagne au milieu du XIXe siècle, soit en pleine révolution industrielle où la production de masse commençait à voir le jour, dans une période où l'on se plaisait à inventer la tradition (Frères Grimm, nain de jardin, les Celtes...). 

La réalité du kitsch survit toujours aujourd'hui, dans des formes traditionnelles, mais aussi dans des formes réinventées (on parlera de néokitsch). Mais sa reproduction est menacée de plus en plus par un désir de re(con)naissance qui invite les individus-monde à vouloir se différencier les uns des autres. Il est menacé par les Ikéas, les Roche-Bobois, les Louis-Vuiton et toutes les autres multinationales qui n'ont autres désirs que d'esclavager le kitsch à l'hégémonie du bon goût en proposant une autre utopie froide et uniformisante : seulement du beau. Il est menacé de pourrir dans les dépotoirs et vit silencieusement dans les sous-sols, les chalets, les greniers, les boutiques de souvenirs ou d'antiquités, son triste sort, celui de s'empoussiérer, d'être ridiculisé, de rester dans l'ombre, de vivre dans la peur d'être jeté. Le kitsch rejoint, au XXIe siècle les rangs des misérables, des miséreux, car il n'a pas sa place dans le temple du goût. Mais comme la classe ouvrière que l'on dit aliénée, le kitsch a l'avantage de demeurer nombreux. Comme omniprésent, il rappelle à ses bourreaux que non seulement il ne pourra jamais l'exterminer en entier, mais qu'ils ont besoin de lui, ne serait-ce que pour se sentir supérieurs. Le kitsch se paye le luxe d'avoir encore de la valeur, à ses yeux. 

De cette valeur certaine émane ce qui préoccupe finalement tout ethnologue digne de ce nom même s'ils font semblant de croire au relativisme culturel : l'authenticité. L'authenticité peut être définie par ce supplément d'âme qui octroie aux groupes, aux objets, un statut d'être supérieur. Ainsi, un authentique vieil objet va devenir du patrimoine, un authentique objet exotique va devenir un trésor culturel, une authentique sacoche LV va devenir un objet de luxe, un authentique "quelque chose" fait par un authentique artiste authentique va devenir un objet d'art, et ainsi de suite.

Dans le cas qui me préoccupe, l'authentiquement kitsch, ce kitsch de statut supérieur, existe-t-il toujours ? Pour tenter d'aller à sa rencontre, j'ai décidé de revenir aux sources de cette authenticité, c'est-à-dire son berceau : l'Allemagne. Comme je ne disposais que de trois jours pour mener mon enquête, j'ai réduit le terrain à une seule ville : Berlin. 

Mais partir à la conquête (à la recherche, désolé de m'être emporté) du dernier kitsch, ou du kitsch dernier (c'est selon), n'est pas une mission facile. Doit-on rappeler ici le caractère agressif (et parfois cannibale) du kitsch ? Qui ne connaît pas un couple d'amis sans histoire que l'on croyait immunisé qui, après avoir déménagé en banlieue, sont revenus avec des bottillons, des bas blancs, un kit qui matche ou pire, l'idée de se marier... Le kitsch saute sur tout ce qui bouge  (même Brie-mon-chien-Bree a été prise de ce fléau une fois en revenant de chez le toiletteur !) et ce qui ne bouge pas (protégez vos sacoches !) ; donc si Berlin s'avère être bel et bien le premier foyer de cette épidémie, mon individualité demeure menacée. 

Pour m'assurer de faire une "intégration" réussie (c'est-à-dire réussir à toffer le plus longtemps possible en enlevant mon masque... culturel) dans ce milieu hostile à la mise à distance, je me suis armé de Grégoire, le gars cool (tellement cool que bientôt à Berlin, le look Freddy Krueger avec une peau de pêche va être à la mode) et Alexandre, l'avant-gardiste (tellement avant-gardiste qu'il a inventé pour nous hier le Pizzotto, soit un remake de pizzaghetti, mais version risotto...) On sait que les cools, avec leur attitude aspirante, inspirante et détachée de leur être, savent pister le kitsch plusieurs jours à l'avance. Cela m'a été utile, spécifiquement que je n'avais que trois jours. Les avant-gardistes, quant à eux, sont pratiques, car ils sont en mesure d'assassiner et/ou de tourner en notre avantage le kitsch qu'ils sentent trop menaçants. Ce sont dans ces conditions minimalistes que je suis partie à la chasse au (à la recherche, désolé de m'être encore emporté) kitsch....

Suite dans le volume deux. 

2009-01-22

les lendemains

(sur le ton d'un discours)

Barrack Obama, c'est un homme pour la promesse de nos lendemains... Je lève ma, mon, heu... je dis "bravo !" à Barrack Obama.
Moi je dis "Bravo !" à Sabrina Parmentier pour la belle opportunité de carrière qu'elle vient de se faire offrir. Sabrina, je ne sais pas si tu vas accepter le poste, mais ça prouve une chose, c'est que t'es promise à un lendemain glorieux ! "Bravo !"
Le Pho 14, j'y retrounerai un de ces lendemains, mais en attendant, son voisin plus propre et plus cher a bien fait ça. Moi je dis "bravo !" à la soupe Huê au boeuf sans pied de cochon, voire à toute leur carte même s'ils mettent du cumin dans le fond du Bo bun à Noémi, et je promets, oh oui c'est une promesse, que j'y retournerai. 
Moi je dis "Bravo !" à demain ! Parce que c'est la journée que je pars à Berlin pour aller visiter Grégoire et Alexandre. Ça promet d'être intéressant ! 
Moi, je dis encore "Bravo !" à demain, car il en a lourd sur les épaules le pauvre. Pauvre lui, je lui promets toujours que je vais lui alléger la tâche, mais à chaque jour, je lui en ajoute ! Lâche pas mon demain ! 

mes envies

J'ai envie de manger une soupe tonkinoise... Cette envie est plus forte qu'une envie de fumer... J'ai vraiment envie d'une soupe. Il me faut une soupe.

2009-01-19

les taches

(Sur un ton publicitaire)

Au passage Dauphine, venez faire la rencontre du somptueux chocolat chaud de L'heure gourmande. Servi dans un décor candide d'une bonbonnière anglaise, votre chocolat de quelques 6 euros prendra quelques minutes à être versé dans une grande tasse à café-filtre. Mais vous pourrez le déguster pendant des heures, en vous aidant de quelques gorgées d'eau dure. Votre pull et votre foie se le disputeront. 

Pour une expérience encore plus riche, accompagnez-le de quelques madeleines encore plus parfaites que Pastinelli et de cakes anglais. Comme les douceurs seront servies avec une jam... profitez-en pour faire découvrir l'expression "jammer" à quelques Français... 

*****

Le Pré-Grill a changé de proprio ! Dorénavant, ça vous coûtera seulement 5 euros de plus pour avoir du vin plus cheap, une fondue au fromage plus liquide et sans charcuteries, un dessert plus petit et de moindre qualité, un beau menu en couleur et un service dans un français douteux. Votre chemise vous en redemandera encore et encore !

****

Procurez-vous ce détachant efficace pour faire partir les grosses taches bien incrustées dans vos fauteuils ! Et avec lui, évitez la fâcheuse posture dans laquelle se sont retrouvés Sabrina et Guillaume, qui, tard le soir, attendaient patiemment le départ d'un gros épais au prise avec une diarrhée verbale sur un sujet hermétique tout en obligeant une pauvre anthropologue à se maintenir réveillé pour une 49e heure d'affilé ! 

2009-01-16

la pornographie

(sur le ton mi-gêné, mais mi-satisfait d'épouvanter Mandoline et les autres avec ce titre qui laisse croire que je vais parler de support masturbatoire)
 
Dans le cours Nouveaux terrains, nouveaux objets qui s'amuse à faire le récapitulatif express de mon baccalauréat, un étudiant de doctorat est venu (hi hi hi) nous parler de son terrain : le milieu de la pornographie parisienne. Bon, mis à part d'avoir un bon sujet (imaginez le terrain), il n'y avait pas de quoi écrire à sa mère (surtout pas la mienne... si ma mère apprend que j'écoute des conférences sur la pornographie, elle va exiger que je revienne au Québec...) Mais toujours est-il qu'il a fait un lapsus SAVOUREUX : tel auteur a coïté sur cette question. Encore une fois, j'étais le seul à me marrer... (en silence en revanche)

Non, les étudiants se sont aussi marrés : un gars a posé une question super pertinente à propos d'un texte qu'il avait lu (duquel il dégageait les concepts-clés de racisme lévi-straussien et de diversité culturelle) et son articulation avec la notion d'espace public. Le prof de l'ENS lui a demandé de quel texte il parlait et le gars n'a pas pu répondre. Les étudiants se sont mis à rire méchamment et le prof a répondu sèchement qu'il ne pouvait pas l'aider... L'étudiant humilié a attendu que les rires s'estompent pour quitter la salle.

J'étais scandalisé. Il y avait quelque chose de pervers dans la situation. Pourtant, le prof n'avait pas l'air d'un sadique méprisant... Ça me conforte dans une idée : jamais je ne poserai une question en classe. 

Heureusement, l'étudiant est revenu (avec une heure de retard) en après-midi, mais cette fois avec ledit texte en main. Je l'ai vu en donner une copie au professeur à la fin du cours. Ça doit quand même être jouissif. 

Je l'ai attendu à la sortie de la salle de classe pour le remercier d'avoir posé la question que j'avais trouvé très stimulante et lui ai donné une copie de l'appel à contributions pour la revue que je dirige avec Catherine. 

2009-01-14

les litchis

(sur le ton d'un travail de psychologie cognitive)

Préambule : À Paris, il fait 4°C la nuit (dehors comme en dedans), le taux de change est indécent, mais les litchis sont à 1,5 euros le kilo... Et je sais pas si vous savez, mais un kilo de litchis, c'est si vite mangé... Et si vite... C'est hors sujet, mais ça permet de faire le tour...
"Et un jus de litchis" dirait la cliente du jeu Big Brain Academy qui séquestre Garde Perron depuis son anniversaire. Il est à se demander si on ne pourrait pas constituer le cas que je questionnerai ultérieur. 
Et un martini-litchis, c'est si bon... Mais je le ferais faire par Sabrina... question d'avoir un double pour le prix d'un... Elle nous a fait un mojitos et oufff... j'étais bien chaud... Belle soirée. Et ce, même si on a évité le pire avec Noémi qui déteste le cumin... (Je leur demande de raconter l'histoire dans les commentaires, car je ne peux pas ploguer le mot "litchis") Cette anecdote croustillante (contrairement aux litchis) n'a aucun rapport, mais il trace le rapport que j'ai développé avec l'objet à l'étude. 

Litchis litchis
Quand on cherche litchis sur YouTube, on tombe sur un vidéo totalement suréaliste où un furet semble hypnotisé par la vue des litchis pendant que joue trop fort une télévision... En plus, c'est rythmé par des sons de bogs informatiques... Du grand art. L'association litchis ou télé = hypnose est donc vraie et prouvée.

Le cas
Julie P. qui me dit qu'elle peut pas s'arrêter de manger des litchis quand elle regarde la télé... Ces postulats nous poussent à cette question : Julie P. est-elle un furet ? 
La meilleure méthodologique selon moi à employer pour démontrer à cette question consiste à vérifier si elle cache des patates dans sa chambre. Je préfère les patates aux litchis, car le mot "patates" est omniprésent dans son vocabulaire. Il y a donc une association patates = litchis qui lui vient finalement du contexte familiale. Les patates prouveront empiriquement le diagnostique à l'effet que Julie P. est bel et bien un furet.
Il se peut aussi qu'elle soit une philosophe que quelqu'un a hypnotisé, lui a fait croire qu'elle est un furet et a oublié de la réveiller. Dans ce cas, ça va être difficile de faire la distinction. Mais le diagnostique demeurera inchangé. 
La furetisation du sujet nous permettra de réfléchir au concept de litchisation hypnotique, de litchis limites et d'humanilitchimalité (soit le fait de se transformer en animal en mangeant des litchis, ou dans des cas plus rares, de se transformer en litchis en mangeant des animaux, et notamment des furets). 
La thérapie que je recommande pour régler sa pathologie est bien entendu la rééducation comporte-mentale. De fait, on l'empêchera de manger des litchis et on lui fera adopter des comportements de loups. Ainsi, le loup va pouvoir prédater le furet en elle et ainsi l'en libérer. 
Nous sommes conscients qu'une telle thérapie comporte certains risques, comme devenir bourdieusienne, dévorer le petit chaperon rouge ou se tenir en meute (comme les Guelphiennes), mais si on lui donne une injonction de la cour pour l'empêcher d'approcher à moins de 300 m. d'une bergerie, elle ne sera pas d'un grand risque pour la société et pour elle-même, donc je la considèrai guérie et je pourrai continué à avoir mes subventions.   
Toot.

2009-01-10

Caféine et crêpes au sucre

(sur le ton d'un roman féminin)

Noémi s'éveilla tard ; heureusement, ça faisait trop longtemps qu'elle dormait mal à cause de réflexions inutiles... Aujourd'hui annonçait la promesse d'une ère nouvelle, une ère vouée au mieux-être, au bonheur, au savoir. C'est le soleil qui lui promettait tant de choses. Si elle se souvenait d'un Paris gris, celui qui s'ouvrait à elle n'était maintenant que jours meilleurs. Enfin, Paris allait être à la hauteur de sa réputation : belle, cultivée et pleine de vie. Enfin, Noémi allait s'y reconnaître.

Et si ce n'était pas la ville qui avait changé depuis la nouvelle année ?

C'est une envie de caféine qui l'aida à se lever de son lit, désormais revêtu de draps de coton propres, qui sentaient encore sa terre natale. Ses valises n'étaient pas encore défaites, mais elle s'en fichait. Elle avait toute la semaine pour remettre son quotidien en ordre. Elle avait de plus grands rêves. Parmi eux : une crêpe au sucre et un bol de café au lait... L'idée de se recoucher pour mieux les imaginer lui effleura l'esprit... Or, Noémi a pris la résolution d'arrêter de se laisser berner pas ses rêves... S'il faut vivre, il le faut au présent. De fait, il faut aller jusqu'à agir... Elle prit le téléphone, comme empreint d'une urgence et composa le 6110. Une voix rauque et grave, une voix qui lui ferait accepter une soirée DVD couché en cuillère, lui répondit :
-Allô ?
C'était Jocelyn, son gros ami ethnologue et gai, qui lui apporte joies, soutiens et parfois quelques Madeleine...
- Qu'est-ce que tu fais ? lui demanda-t-elle, quelques chants d'oiseau silencieux en sourdine...
- Ha bien je, bien j'a mmmmzz, heu, pas grand chose
- T'étais couché (en espérant qu'il ne lui réponde pas qu'il avait déjeuné...) ?
- Un peu, je ne dormais pas. Ha, Noémi (?) Il est quelle heure ?
- Presque midi. Je veux manger une crêpe au sucre. On pourrait aller à Montmartre.
- Ha, heu... il faudrait que je travaille, sinon que je compose mon blog, mais sinon, je peux manger aussi...
- Génial. Je dois prendre ma douche alors on se retrouve dans une heure trente en bas.
- Une heure trente ?
- À tantôt !

Et elle raccrocha, de peur qu'il refuse. Après tout, une heure trente, c'était bien peu pour prendre soin de soi... Une heure trente, c'est bien peu mis à côté des 26 ans qu'elle avait passé à prendre soin des autres. Une heure trente, c'est tout ce que ça prend pour renaître de sa nuit. Mais une heure trente, c'était quand même long avant de prendre sa noire liqueur... Elle saura attendre. Il lui fallait l'attendre...

****

"En bas", comme elle disait (comme ils disaient tous), était l'endroit idéal pour les points de ralliement. À deux pas de la porte, il y avait lecture, espace et même quelques fauteuils pour rendre l'attente plus agréable. Noémi se laissait toujours attendre quelques minutes de splendeur, comme un spectacle de qualité ou un bon restaurant. Elle y trouva son ami Jocelyn qui discutait tranquillement avec Julie H. Les deux filles ne s'étaient pas revues depuis plusieurs semaines et se sautèrent dans les bras, comme si plusieurs douloureuses années les avaient séparées. Avant de s'excuser de son léger retard, Noémi s'inquiéta des vacances de Julie. Cette dernière lui lança dans un désordre excité les grandes lignes de ses quelques semaines passées en Ontario auprès des siens. Puis, elle retourna la question à Noémi, et ce, même si elle la savait inutile ; ses yeux pétillaient et même sans café, Noémi dégageait une chaleur et une énergie que personne à la résidence ne lui connaissait. Ses vacances lui allaient bien. Les amies entrèrent plus en profondeur sur certains points, mais devant le caractère quelque peu "public" du point de ralliement, elles décidèrent de suspendre l'entretien avant qu'il devienne trop intime.

En fait, Noémi était aussi préoccupée par Jocelyn ; son silence ne lui ressemblait pas. Par quoi était-il provoqué ? De plus, il avait adhéré la veille sur Facebook à un groupe "I hate 2009 already" et son statut avait quelque chose d'alarmant. Jocelyn était nécessairement déprimé et avait besoin d'en discuter. En sortant de la résidence, elle tenta de lui arracher les vers du nez, mais il résistait. C'était peut-être plus grave qu'elle le croyait. Peut-être traversait-il une période difficile et préférait cultiver le silence. Dans ce cas, elle serait aussi là pour lui tenir la main, pour braver, sans bruit, la tempête à ses côtés. Par respect, par humilité, il faut savoir être là en silence.

Pour tout dire, Jocelyn, obèse assumé, n'avait que très faim. Il avait dû attendre, en jouant au Sudoku et à Bejewelled sur son nouveau iPod touch, plus de deux heures le moment de déjeuner. Cette attente était contraire à ses habitudes et quand elle ne le rendait pas grognon (comme sa tendre moitié qui s'obstine à croire que son estomac n'influence jamais son humeur), elle le rendait distrait. Distrait d'autant plus qu'il avait déjà discuté avec Noémi et Julie H (mais séparément) de leurs vacances respectives, et qu'il avait même eu l'occasion d'entrer dans les détails. Il n'avait donc simplement rien à dire. Et Noémi n'avait sans doute rien à ajouter, car elle marchait à ses côtés sans dire mot. Il avait consenti à lui prendre la main qu'elle lui avait tendue par souci d'attention. Selon lui, Noémi, qui avait dû affronter plusieurs tempêtes, devait, après tout, avoir besoin d'une certaine certitude que le calme existe bel et bien.

Jocelyn osa briser le silence d'un beau samedi d'hiver sur Paris avec un "J'ai faim" plutôt impromptu. Noémi, qui savait Montmartre (et par extension son café) très loin, décida de changer les plans : pourquoi ne pas rester sur la rive gauche et profiter de la frénésie à la fois jeune et littéraire de Montparnasse ? Là aussi les crêpes et le café y étaient bons à penser... Jocelyn accepta sans penser. En fait, il aurait sans doute accepter l'idée de manger jusqu'au disgracieux Resto U de la cité universitaire qui s'éloignait tranquillement derrière eux.

Dans la station, ils entendirent un train partir. Ils n'étaient plus pressés. L'attente était douce et réconfortante. Noémi se sentait bien. Elle se souvint des bons moments passés à Paris ; ses nouveaux amis, l'Halloween, ses sorties, la gloire de l'un de ses travaux scolaires... Parmi ces souvenirs, surgit celui d'un sympathique petit coin de Paris (comme il en existe plusieurs) près de Montparnasse, lequel elle avait exploré en compagnie de sa soeur. Pour couronner l'instant, elle se rappela qu'il se trouvait à la station de métro Gaîté. Savoureux. Elle, et l'idée de son café, y était déjà...

Pour retrouver sur quelle ligne se trouvait cette station, Noémi sortit un peu honteusement (ne voulant pas se faire étiqueter de touriste malgré son accent canadien) de son immense sac à main son petit guide rouge "Paris pratique". Elle n'avait pas utilisé ce guide depuis... Depuis quand ? En fait, elle n'avait pas envie de réfléchir à cette question. Elle connaissait la réponse et savait la contourner... Elle l'avait en fait utilisé la dernière fois lors de la visite à Paris de son ex petit copain... Visite qui s'était soldée par un constat d'échec. Elle fit valser la pensée. Or, un élément attira son attention : une page du livre semblait avoir été mis en évidence par l'ajout d'un signet. Quelle était cette page à se souvenir ?

Elle l'ouvra et tomba nez-à-nez non pas avec une, mais avec trois photographies de son ex. Il s'agissait de photos issues d'un photomaton qu'il avait prises pour une raison quelconque, comme se faire faire une carte d'identité, satisfaire une pulsion narcissique, ou venir hanter le bien-être de Noémi quelques semaines après leur rupture... Les trois ex semblaient la narguer. Mais au lieu de s'en vexer, elle en rit. Quelle situation ! C'était un rire, mais certainement un rire noir. Noir jaunâtre, un rire noir café... En fait, la situation aurait été plus comique après un café.

Jocelyn, à la fois alarmé et amusé en voyant ce signet, s'en empara rapidement et le jeta rapidement aux poubelles. Les deux rirent de bon coeur. Puis, il arrêta brusquement et s'excusa : cette tâche aurait selon lui dû incomber à Noémi. Il avait fait un acte de violence symbolique ; ce n'était pas à lui de se débarrasser des souvenirs d'autrui. Qui plus est, elle aurait pu vouloir conserver ces images. Noémi le rassura qu'elle n'avait pas besoin de ce type d'exorcisme, et qu'elle n'avait pas non plus besoin de conserver les photos, sinon pour lui jeter un sort, mais elle n'en avait ni le talent ni l'envie.

Dorénavant, tout ça tout ça, c'était pour elle du "vomi" (pour reprendre ses termes).

"Le vomi", pour Noémi, était la version abrégée, vulgaire et combien plus imagée, gaillarde et amusante de dire :
"Loin de moi cette idée." Comme le vomi, une idée, une pensée, comme celle de son ex, devenait indigeste. Dans ce cas, mieux valait la vomir, car c'est tout ce qu'elle valait. Le vomi, c'est tout ce qui était ou la rendait hors d'elle-même et qu'elle ne voulait surtout ne plus voir entrer à nouveau. Le vomi, c'est tout ce qui est disgracieux, impropre, intolérable. Le train arriva et ils s'échouèrent sur les premiers strapontins.

Dans le wagon, il y avait un vieux nain, mal-habillé, qui les obligea à retenir un fou rire, un fou rire coupable de jours heureux. Station Denfert-Rochereau, Noémi et Jocelyn transfèrent vers la ligne 4. Sur le quai, et ce n'est pas un "hasard" purement (in)esthétique de l'auteur, flottait une flaque de... vomi. Quel ironie ! Une grande, comme celle que décrivait Noémi dans la situation précédente. Jocelyn croyait que son amie allait la voir et bifurqua vers la gauche. Mais Noémi, bercée par un rire café-crème, ne dévia pas de sa trajectoire. Elle rigolait joyeusement, du nabot. Comme à l'habitude, et comme en amour, Noémi se lançait aveuglement les pieds premiers dans n'importe quel (petit) plat, de la veille ou du surlendemain. Jocelyn la prévient d'un "Attention !" précis et "on time" que Noémi évita sans justesse. N'ayant plus beaucoup de temps avant l'incident, il en tenta un deuxième, osa un troisième encore plus rapide, mais au quatrième, il était déjà trop tard. Noémi avait marché dans la première petite flaque de vomi. Heureusement, contrairement en amour, elle ne s'enfonca pas dans la seconde flaque, beaucoup plus grande, le sourire aux lèvres. Car si elle avait agit comme en amour, elle s'y aurait vautrer, question de s'y salir, de s'y enliser. Cette fois, elle ne s'y sera trempé que le petit orteil. Elle fut fort heureusement partie aussitôt... Aurait-elle déjà retenu sa leçon ?

Toujours est-il qu'ils continuèrent leur chemin, en riant, encore, de la journée un peu loufoque qu'ils étaient en train de vivre. Noémi avait néanmoins un petit goût amer en bouche, mais ce n'était pas celui du café.

Station Montparnasse, Noémi et Jocelyn prirent la première sortie, ne sachant pas trop de quel côté de la tour ils se trouvaient. Ils se heurtèrent à une marée humaine de coureurs de soldes... Car en janvier, Paris se réduit, en argent, mais en espace aussi. Avancer devenait un défi dans cette foule compacte de consommateurs à crédit. Tous les coins sympathiques étaient susceptibles de ne plus le devenir. Il fallait seulement fuir les centres, fuir les espaces commerciaux. Il n'y avait plus question d'atteindre Gaîté, s'échapper était la seule option. Jocelyn commençait à croire qu'il ne mangerait jamais et le besoin de caféine
tourmentait Noémi. Le spectre du McDonald rôdait dans tous les coins du quartier...

D'un non-désaccord commun, les amis se réfugièrent dans un café commun où ils ont pu trouver sans attendre une table. Sans attente est plutôt faux, car pour l'atteindre, ils ont dû patienter plusieurs minutes que le couple situé à côté de leur table leur fasse de la place pour passer. À Paris, l'espace est un luxe qui se paie à grand prix. Pour rendre la facture moins salée, il faut accepter de diviser les mètres carrés par plusieurs clients. Le restaurant prend alors parfois des allures de casse-tête à la "Rush Hour".

Le menu était déjà sur la table, et par l'allure commune du lieu, on devinait ce qui s'y trouvait : des entrées trop chères, des salades, des sandwichs, des croques-monsieurs, des crêpes sucrées, des desserts trop chers, un plateau de fromages et de charcuteries et plusieurs vins essentiellement d'origine française. En effet, c'est ce qui s'y trouvait, avec quelques spécificités, indignes d'être soulignées. Comme il n'y avait (étrangement) aucune crêpes salées, Noémi et Jocelyn restèrent accrochés aux mots "oeuf", "lardons", "croûtons de chèvre" que l'on pouvait trouver dans la salade alpage... C'est ce qu'ils prendront, étant donné la résonance du repas avec le "oeufs-bacon-rôties au Cheeze Whizz" qui leur manquait déjà. (Enfin, le Cheeze Whizz ne manquait qu'à Jocelyn)

Le serveur, anonyme, leur apporta des fourchettes déséquilibrées (qui tombaient partout et tout le temps dans tout le restaurant), une trop lourde carafe d'eau dure et les assiettes, plutôt anonymes. Ils mangèrent en silence, déçus, il faut dire, qu'il ne s'agisse pas d'une crêpe au sucre montmartrienne. Une langueur leur élançait la mâchoire inférieure. Ils se racontèrent des anecdotes peu croustillantes, comme leurs croûtons de chèvre qui manquaient cruellement de miel. Noémi n'avait pas le goût de prendre un café à cet endroit. Elle espérait mieux. Elle voyait plus grand. Jocelyn, quant à lui, rêvait à un dessert. En discutant, ils décidèrent d'aller s'en choisir un au Ladurée des Champs Élysées. Et pourquoi pas, c'était à leur portée...

Ils attendirent longuement l'addition, puis se souvinrent qu'à Paris, du moins dans un restaurant qui se veut respectueux, il fallait la demander. Contrairement au Canada où les serveurs glissent automatiquement (et subtilement) l'addition sur la table (parfois pendant le repas) pour inviter les mangeurs à disposer de leur table comme ils l'entendent, le mangeur parisien interprète une telle pratique comme une impolitesse, un geste indélicat, qui invite le client à disposer, point. Or, même après l'avoir demandé, ils dûrent patienter. Noémi comptait les minutes qui la séparait de son café.

À la station de métro de Montparnasse, Noémi fut captive d'un tourbillon de consommateurs déchaînés. L'instant d'après, un inconnu voulut la prendre par la main. Plus il insistait, et plus la main de Noémi se crispait. En fait, le pauvre était en train de se tromper de main, tout simplement. Sa copine, derrière une Noémi confuse, riait aux éclats. Il s'aperçut bientôt de son erreur (ou de son acte manqué), et lui présenta ses excuses... Noémi les accepta sympathiquement et poursuit son chemin. La péripétie avait la couleur de cette journée, une journée sans café.

*****

Noémi et Jocelyn aperçurent l'Arc de Triomphe en sortant de la bouche de métro. Noémi huma l'air frais en se fermant légèrement les yeux. Même dépendante au café, elle se sentait (enfin) libre. À cet endroit de Paris, il semble impossible de méditer sur ses défaites personnelles. Là ne flottent que des sentiments de victoires, de réussites et de patriotisme. L'orgueil, le torse et le porte monnaie semblent être gonflés. Malheureusement, pour se rendre au Ladurée, il fallait s'en éloigner.

Tous les cafés des environs se vendaient à fort prix : 8 euros. En considérant que celui, fort respectable, de la MEC se monnaie à 40 centimes, Noémi et Jocelyn décrétèrent qu'encourager pareille inflation constituait une insulte à leur intelligence de consommateur. Ils accepteraient volontiers de payer 10 fois le prix de la MEC, mais 20, c'était hors de question. Ils allèrent cependant vérifier les prix dans la boutique Nespresso. Là, le café est réduit à deux fois le prix de partout ailleurs (pour reprendre l'expression de François Pérusse). Or, l'insulte demeure tout aussi grande, car les cafés qui y sont servis agissent en qualité de spot publicitaire. Va pour deux euros, mais quatre euros pour un café, une pub et un sentiment d'être trop pauvre pour se payer un vrai café non sponsorisé aux Champs Élysées, c'est inacceptable. Ils sortirent en claquant presque la porte.

Encore frustrés par l'indécence des prix élyséens, les amis aperçurent un LV qui leur rappela d'un coup d'oeil la fonction sociale (et économique) des produits de luxe. Ils y entrèrent comme deux pauvres enfants dans une confiserie, espérant même que par charité un commis leur fasse don d'un modeste présent, ou encore que par une chance extraordinaire, ils deviennent les millionièmes pauvres à franchir la porte de cette inaccessible maroquinerie et obtiennent ainsi toute une collection de valises. Mais, ô misère, il n'y a jamais de solde, même en janvier, ou d'événements promotionnels chez Louis Vuitton. Noémi et Jocelyn erraient dans la Mecque de la sacoche comme dans un musée, et se plaisait à consulter les prix pour admirer la part de folie qui se trouve, il faut croire, dans chaque être humain.

Or, l'inaccessible a une fin ; Jocelyn a pu trouver un petit cadeau pour son chum (qui collectionne déjà les éléments masculins) en deçà du 20 euros. Il a poussé l'audace jusqu'à payer comptant (...) et demandé un emballage cadeau. Il a en revanche compris par la suite que cet acte renfermait un problème de sens ; une boîte cadeau signée LV contenant un objet de peu de valeurs ne peut que décevoir. En effet, c'est comme recevoir des tasses dans une boîte de DVD pour reprendre l'image d'une certaine publicité. En fait, le véritable cadeau était davantage pour Jocelyn. Celui lui a permis de sortir de la chic boutique avec un sac. Et sortir avec un sac, c'est se mériter tout une reconnaissance que les pauvres - ceux sans le sac - n'ont pas. De ce fait, le portier, qui ne parlait à personne, a pris la peine de lui sourire et de lui souhaiter "Bonne journée, monsieur". Les autres clients le regardent avec un brin de considération - ou avec moins de condescendance (sauf les Asiatiques qui ont trop de sacs de prestige pour remarquer la parade) et les non-clients l'envient du regard. Sur la voie publique, il appartient à une classe supérieure à la sienne : son manteau de TAC se transforme dès lors en cuir véritable, son ensemble jean/chemise GAP prend des allures de cartes de mode et ses souliers Steve Madden n'ont jamais été aussi bien mis en valeur. Il devient un riche qui a sa place sur les Champs Élysées.

Et Noémi, belle comme Paris (surtout avec son air insulté qu'elle a depuis que le portier ne lui a pas souhaité une bonne journée), rend cohérent tout le tableau ; car la seule raison qui expliquerait pourquoi une femme si belle se promène aux bras d'un être trapu et plutôt laid, c'est que cet homme soit riche et fasse des cadeaux signés LV. Enfin, il y en a une autre, soit que l'homme soit gai et gentil, et que le cadeau n'ait rien de glamour, mais ce n'est pas cette hypothèse qui vient à l'esprit en premier... Et c'est dans cet état de présence que le couple factice a entré au Ladurée.

Une file monstre força Noémi à renoncer à son projet de café dans le salon de thé. Il était 17h00 et le Ladurée n'est pas une destination originale pour le goûté. Ils empruntèrent néanmoins la file de gauche qui leur permis de se procurer un mémorable palmier à deux euros que Jocelyn dévora entier, dans la rue, en prenant bien soin de rendre lisible pour les passants le papier vert et doré qui le recouvrait. "L-A-D-U-R-É-E" Ce n'est peut-être pas les meilleures pâtisseries de Paris (chacun y va de sa théorie), mais elle demeure la plus prestigieuse ; alors mieux vaut rentabiliser son investissement en insistant sur le capital de prestige.

Noémi, quant à elle, marche d'un pas décidé. Elle ne pense qu'au café qu'elle n'a pas eu et regrette l'omniprésence typiquement américaine du café Starbuck... Si on peut "mourir de soif au milieu d'l'océan" comme le chantait Richard Séguin, on peut manquer de café en plein Paris... Son pas est rapide et à la première station de métro qu'elle rencontre, elle oblige Jocelyn à terminer son palmier afin de regagner la MEC, et surtout, son café de quelques centimes.

En arrivant sur le quai de la ligne un, le métro a déjà les portes ouvertes. Noémi se précipite et rase d'entrer en collision avec un pauvre homme encombrant qui traînait là sur le quai, devant la porte, pendant la sonnerie de fermeture, avec une valise. Jocelyn eut moins de chances ; il s'accrocha dans la valise, et pendant que les portes se ferment, il fait passer son sac LV avant lui, ce qui ne lui donne pas assez de temps pour passer ses épaules. La porte s'écrase sur lui, il tente de se dégager, et il y parvient difficilement. Cette pression lui fera souffrir quelques jours. Dans le wagon, il n'a plus l'air riche, mais seulement d'un idiot qui s'est buté sur une valise et à une porte presque fermée.

La station Châtelet-Les Halles (station balnéaire) prend des airs d'égouts par l'odeur qui s'en dégage et par le fourmillement des rats des soldes qui s'en échappent. Jocelyn et Noémi réussissent à obtenir une place dans le RER B et regagnent paisiblement leur foyer. Mais Noémi ne se dirigera pas tout de suite à sa chambre. Elle s'était fixée un rendez-vous plutôt intime avec une certaine machine à café...

En écoutant la machine se mettre en marche, elle se dit qu'elle avait l'impression d'avoir attendu trois ans. Pendant tout ce temps, il l'attendait là, sagement, et au chaud, à la maison. Mais a-t-elle perdu pour autant sa journée à le chercher ?
Sans doute pas. En se levant ce matin, Noémi a compris qu'elle n'avait pas besoin simplement d'un café. Elle avait besoin de le mériter. Elle devait agir pour l'avoir, non pas pour l'obtenir, mais simplement pour se le mériter. En ce sens, elle ne cherchait pas un goût, un prix, une réputation, un exotisme, mais un état d'être. Elle avait besoin d'agir sur sa vie, pour lui, plutôt que de se le verser passivement. Elle avait besoin d'un prendre un grand détour pour pouvoir être capable de mieux revenir chez elle, cette fois la tête haute et prête, prête à consommer un bon café et qui sait, quelques crêpes au sucre en pensée...

2009-01-09

le plus long

(sur le ton d'un message Facebook)

Si l'année 2008 était bien chargée, et a fini en beauté, 2009 s'annonce être une année bien longue...
Bien mauvaise sera l'année 2009. Elle a très mal commencé...

J'ai perdu mon chargeur à batterie pour ma caméra, j'ai pris 12 livres, j'ai pogné le mauvais autobus (je pouvais prendre la 272 ou la 381, j'ai pris la 372... bravo !) et ait été pogné à marcher 1h30 dans rue enneigée pas de trottoir pendant que j'étais bien triste, bien seul, bien sans le sous, avec une grosse envie de pisser, une grosse faim, un chien dans une cage, des paquets très lourds plein les bras. Sinon les hot dogs du Valentine étaient pas mangeables, mes amis se sont pognés, mon chien a refusé de me dire bye... Je m'ennuie de mon chum... Sinon j'ai deux cours qui ont (encore) été repoussés, et j'en ai manqué un autre... (bah, c'était sur Bourdieu... c'était donc inutile). Ils avaient fermé le chauffage dans ma chambre, je me mourais de froid. La femme de ménage n'avait pas fait le ménage. Ma seule plante est morte. Ça m'a coûté 1000 fuck'n euros en deux jours à mon arrivée à Paris (transport-loyer-épicerie-argent de poche-réservation pour Jérôme-restaurants). Y a des taches bleues de détergent sur mes nouvelles culottes blanches. Il y a pas un chat qui a soumis une proposition pour Conserveries mémorielles... Y fait frette à Paris.

Sinon j'ai payé pour deux souliers non identiques... Bien oui... Je vais au Browns, je spotte des souliers en "réduction" (réduit à deux fois le prix de partout ailleurs comme dirait françois pérusse), je dis à la vendeuse blonde que je veux essayer eux-autres dans le neuf... elle me dit d'essayer le démonstrateur... Hou hou, il me fait, je l'achète, elle va chercher son jumeau, je les paye, les fout dans ma valise, pars pour six mois et oups, finalement le deuxième est plus long... c'est un neuf et demi... Bravo ! C'est en effet la marque : Bravo Browns... Mes propres souliers (en effet, ils sont propres, je ne les ai jamais portés) me narguent... 70$ au vidange (en fait, je vais les redonner à Jérôme et il va se faire rembourser mon argent mais en attendant, je dois m'en acheter d'autres à Paris... et les moins chers sont à 90 euros quand le taux de change est dans le tapis...)

Sinon, je n'ai pas fermé l'oeil du trajet d'avion... En fait, oui. Mon corps voulait dormir (Gravol aidant)... Mais en même temps, il devait lutter pour s'empêcher de lutter l'une des 234 personnes qui m'a frôlé (juste assez pour me réveillé) durant le trajet pour aller aux toilettes... Lutter l'une de ces personnes, ou l'un des 65 agents de bord d'Air Transat qui, pour se maintenir réveillés, maintiennent tous les passagers réveillés... Tous les prétextes sont bons pour déranger le sommeil : un petit peu d'eau, des écouteurs, un film... Un repas... de l'eau... "vous avez échappé ça monsieur..." un deuxième film... un peu d'eau... "Ça y est, j'ai envie." Ho surprise en plein milieu de la nuit : la boutique hors-taxe ! Un autre film, un autre breuvage, mon voisin veut aller pisser... oh, il revient... La voisine du fond maintenant de faire son petit tour pour se dégourdir les jambes. Une collation. Un breuvage. Encore la boutique hors taxe... Enfant-soleil... Vous avez apprécié votre vol ? Non !

Je vous jure qu'il y en a un qui m'a réveillé pour savoir si je voulais de l'eau... Il m'a tapé sur l'épaule. Mon côté Français s'est réveillé : je lui ai fait une méga moue et lui ai dit oui...

J'arrive cerné jusqu'au nombril. Mais j'ai un putain de cours ! Incapable de me maintenir debout, je veux aller me coucher, mais mes draps sont sales et ma chambre est un véritable réfrigérateur. Je tombe quand même endormi... Une demi heure plus tard, Jérôme m'appelle. Je ne me souviens plus ce que je lui ai dit, mais j'espère que c'était moins froid que ma chambre... Je m'assois dans mon lit, et à ce moment précis, ça va quand même bien. Il me reste une heure avant d'aller a mon cours. C'est long. Alors l'idée brillante de dormir à nouveau me vient à l'esprit. Je reprogramme mon cadran pour me laisser dormir une autre demi-heure. Il sonnera pendant 8 minutes. Je suis certain que durant ces minutes, j'ai vécu le même état d'âme que quelqu'un cliniquement mort... J'étais certain que j'allais ne jamais m'en sortir. Je veux rester couché, mais je me dis : si je ne vais pas au cours, c'est que j'aurais pu resté plus longtemps à Québec. Ma peur de décevoir Jérôme me pousse à me lever et à aller sous la douche. Là, j'ai faillis mourir de froid. Quelle idée de prendre une douche nu comme un ver !

Je suis 15 minutes en retard sur mon horaire, alors je me claque un panini sur le bord de la bouche du métro. Il m'écoeure alors je finis par le jeter à mi-parcours. Dans le métro, je rase de manquer ma station... Vavin... La seule idée que j'ai en tête, c'est que "Vavin", ça ressemble à "Vagin". Et je trouve ça drôle. Pourtant, il me semble que je me suis déjà fait la blague...

À l'université, je ne sais plus où est mon local. Je consulte les feuilles sur le babillard, mais je suis incapable de lire... Je décide que mon cours est au deuxième. C'est long monter au deuxième... Je m'écrase dans la salle 6, à moitié sûr qu'il s'agit de la bonne. Je suis seul, le cours est censé commencé dans cinq minutes. Étrange. Il fait aussi froid dans le cours que dans ma chambre (un épais a ouvert toutes les fenêtres et moi, pas plus brillant, je les regarde en allant surtout pas les fermer). Une fille arrive à 15h pile et ferme les fenêtres en me trouvant bizarre. Je suis content de ne plus être seul, mais je ne lui adresse même pas un sourire. Je ne sais pas de quelle couleur je suis. Le cours s'annonce long... Nous attendons. Pendant 10 minutes, je fais jouer sur "repeat" la chanson I'm a Big Noodle de Evolution Control Committee... le prof arrive enfin et quatre têteux la suivent de près. C'est pas le prof habituel... Je me rappelle que c'est un cours en garde partagée...

La nouvelle-docteure-et-ancienne-chouchou-du-prof-qui-a-pondu-une-excellente-thèse-et-qui-vient-nous-en-parler-mais-dans-le-fond-n'a-pas-encore-de-poste-et-une-chance-que-le-prof-accepte-encore-de-la-faire-travailler-contre-un-poignage-de-oups-je-suis-pas-attentif-a-ce-qu'elle-dit se présente... Elle nous remercie d'être venu malgré la température extrême (-12). Comme c'est son premier cours avec nous, elle veut qu'on se présente chacun notre tour. Quant aux nouveaux (moi et la première fille arrivée), il faut lui dire ce qui nous a motivé à choisir le cours. Moi, j'aurais trouvé que cette question aurait été plus pertinente à posé aux "anciens" : qu'est-ce que vous faites encore ici ? Pendant que l'autre fille parle, je me "dare" de lancer : "J'ai mangé mon caca !" (copyright : Renault dans le Bye-Bye) et me trouve très drôle (surtout que c'est un cours qui ne cesse de parler de cul pour aucune raison). Mais bon, à mon tour, je baragouine un "Chu Canadien, ch't'en thèse en ethno, Daniel Fabre, cotutelle, Université Laval, je sais pas ce que je fais ici, mais je réfléchis"... Ouff, mon tour est terminé... C'était long.

Écoutez, jamais je n'ai eu un cours aussi long... je notais, comme au secondaire, à chaque fois qu'on avait réussi à passer un nouveau 5 minutes. Je cognais des clous sans grandes convictions... Comme un vieux col bleu syndiqué sur le bord de la retraite... (Métaphore digne d'un vrai beauf de la droite) Ca parlait de personnage liminaire et moi, j'avais "I'm a Big noodle, I'm a big Noodle, I'm a big noodle" dans la tête... Le cours ne finissait plus. Dans les 15 dernières minutes, je finis par m'intéresser à son propos et me dit : ha ! Ca cadre dans le sujet de thèse de Noémi ça ! Le cours se termine et l'ironie la plus totale, je suis complètement réveillé.

Je me dis : je vais en profiter pour aller dire bonjour à Sagui et récupérer mon portable... Beau projet... Dehors, les Parisiens courent dans les boutiques pour se réchauffer, et moi j'ai le manteau ouvert.... Je me rends chez le magnifique appartement à la sonnette. Elle ne me cause cette fois aucun souci. Sabri me raconte ses péripéties, et j'oublie la notion de temps. Mais là, je suis à un point de non-retour... Je ne peux plus aller me coucher avant souper, je dois m'endurer jusqu'à la nuit... Ça me parait loin, mais le couple me divertit et me font découvrir le Tambour, un resto français peu dispendieux et vraiment bon.

Je dois dire que je suis pâmé d'admiration devant Sabrina et Guillaume : le ciel leur est tombé 5 fois sur leur tête et ils continuent de demeurer tout sourire. Je soupçonne que Guillaume n'est pas actuaire pour Axa mais qu'il est en fait revendeur d'opium... Ca expliquerait aussi le bel appartement.

À 8h30, je sens mon corps me dire : une heure de plus et je te quitte... Je ne sais pas comment il aurait fait, mais je ne veux pas essayer pour voir... Je leur présente mes excuses et m'éclipse... Je ne sais pas comment j'ai fait pour me rendre à la Cité sans faire une connerie... et sans dormir dans le RER et me ramasser je ne sais où...

J'entre à la MEC et tombe nez-à-nez avec un segment des 24 petits Guelphiens qui viennent d'aménager dans la résidence... Ils suivent un espèce de cours d'intégration à la France de niveau fin cégep. Je leur dit bonjour. Ils m'ignorent... Ha... L'année va être longue...

9h30 : J'appelle Julie P, en pyj, juste pour dire "Patates". Je me retrouve dans sa chambre... J'ai un discours incohérent, elle me congédie... C'est long marcher du 322 au 110...

9h45 : J'appelle Jérôme. Juste parce que je veux entendre sa voix. Mais j'arrive seulement à être bête comme mes pieds. Il m'envoie me coucher... J'aurais voulu qu'il me berce...

La fin du jour le plus long pourrait s'arrêter ici, mais ça serait faux. Car je n'ai pas eu l'impression de dormir. J'ai ouvert les yeux 12 heures plus tard, et je sais que j'ai dormi, car je me rappelle d'avoir vu Nicolas me dire (avec l'accent de Galen Weston) "Je parle bien le français du Choix du Président." Je me demande encore si c'est une belle critique sociale, la traduction française de "Yes ! I speak Wall Street english" qui placarde le métro parisien ou un rêve pseudo cohérent...

Jeudi matin, le roi, sa femme et le petit Prince, ainsi que JulieP et moi-même sommes allés déjeuner chez Pho 14 pour le grand retour de l'éclatante Noémi. Le repaysement était total (il manquait cependant Julie H.) et plutôt sympathique. C'était la meilleure soupe tonkinoise et la meilleure table qu'on ait eu. Mais j'ai perdu le compte sur le nombre de soupes que j'ai mangé depuis le début... 10 ? 11 ? J'aurais dû les noter. Quoique, ça aurait été trop long...

Au retour, Julie P. courait contre sa montre (je crois qu'elle a gagné, car en France, les minutes sont plus longues...) et j'ai enfin défait ma valise... Noémi en a profité pour perdre son temps. On s'est retrouvé pour aller au (grand) Champion (international de course).

Et ça nous a sauté au visage comme un choc culturel : maudit que c'est long attendre aux caisses à Paris... À notre tour, la caissière était là à gueuler contre Noémi, car elle avait oublié de peser ses bananes. Entre deux remontrances, elle discutait avec Yvette, plus loin dans la file, de ses problèmes de santé et de la difficultés de caissières... Avoir était game, je lui aurais envoyé cette réplique :

"Hey fainéante ! Les caissières au Canada, elles restent debout, ce sont elles qui emballent, elles ont pas le choix d'avoir le sourire et en plus, elles travaillent vite et bien, elles. En plus, elles sont jeunes et jolies contrairement à ici ! Alors tes putains de bananes... fourre toi les où je pense... Et si ça se trouve, ça va t'accrocher un sourire dans la face !"

Mais bon, le gardien n'était pas trop loin...

Le retour fut pénible... C'était long... et terriblement lourd. En plus, on a croisé un autre segment de Guelphiens encombrant, qui n'ouvrent pas la porte, ne se tassent pas du chemin et ne répondent pas aux bonjours francophones... C'est encore trop tôt pour les traiter ouvertement sur le blog de "grosses truies" ou de "machins pas chouettes" (enfin, c'est à voir), mais disons qu'ils semblent faire la queue pour entrer du mauvais bord de mon estime. Plusieurs les détestent déjà. Moi mon opinion est encore malléable... Quand je rendrai mon verdict, je composerai un post (comme les chouquettes ou l'eau dure...)

Mais pour ceux et celles qui souhaitent vraiment que je les déteste pour avoir un maximum de contenu juteux ça regarde bien : ils ont pris la place de personnes que l'on aimait bien, ils sont plutôt bruyants et ne cesse de dire "Oh My God !" et "It's Gorgeous !", ils sont jeunes, monopolisent les lieux publics (cuisine, salon, hall d'entrée) car ils se déplacent toujours en meute et par-dessus le marché, ils sont des Ontariens-unilingues-anglophones... À ce chapitre, ils auraient dit (ce sont des pallabres) à des anglophones qu'ils n'avaient heureusement pas besoin de parler en français étant donné que leur prof de leur unique cours était anglophone (alors, pourquoi un cours sur l'intégration ?), ce qui explique pourquoi ils ne répondent pas lorsqu'on leur dit "bonjour".

En fait, s'ils sont si faciles à détester, c'est surtout qu'ils sont nouveaux. Ils agissent en qualité d'étrangers ; pas étrangers dans le sens Japonais du terme, mais étranger comme l'envahisseur qui bouscule notre quotidien. Quotidien qui, après trois mois à la MEC, est fier de s'être trouvé une nouvelle posture. En fait, les haïr collectivement semble la solution la plus simple, car ils menacent notre territoire : le territoire physique (les lieux), mais aussi celui du quotidien. On ne les re(con)nait pas, car on refuse qu'ils puissent partager avec nous, à l'intérieur de nos murs, un sentiment d'appartenance. En fait, c'est facile se sentir attaquer dans ces circonstances ; en plus, ils sont beaucoup, ce qui ajoute à la violence symbolique. Je dois prendre un peu de distance face à tout ça et je vous reviens là-dessus. (je reviens du dîner et j'en ai rencontré 3... Elles ne m'ont pas parler, mais je ne les ai pas trouvé déplaisantes. Mais je me dis que pour vous, je devrai me forcer un peu à les détester, quitte à être de mauvaise foi pour obliger le récit...)

Après une belle épicerie, la logique a voulu que je cours au restaurant (again) manger une excellente pizza. Je ne sais pas si je pourrai encore apprécier les pizzas américaines... En fait, on soulignait dans ce resto le départ de Van Troi Tran qui doit s'exiler au Canada, barrer toutes les portes, et rédiger une thèse (au moins 300 pages) en trois mois. Bon, s'il ne lisait pas mon blog, je dirais : c'est un objectif complètement indécent ! C'est IMPOSSIBLE, sinon avec un retourneur de temps ! (Non, je n'ai jamais lu Harry Poter, c'était juste dans le troisième film) Mais vu qu'il le lit, du moins parfois, je dirai : c'est bien se donner un si beau défi ! Si on vise "performance et excellence" (clin d'oeil à mon prof de math 536) c'est bien de se mettre un peu de pression... Aller, vas-y ! t'es capable !

Au souper, ou plutôt après, j'ai donné un petit cours de diction à des Français... C'est long... Béni soit Grégoire qui en fait sa profession. En fait, j'ai visé trop haut avec le "tabarnak". J'ai abandonné à la deuxième syllabe.
Le Français : "Tabernacle"
Le prof : Non : Tabarnak...
Le Français : "Tabbernacle"
Le prof : Non : TabAArnak...
Le Français : "Tabarnacle"
Le prof : Non, Tabâââ
Le Français : "Tabà"
Le prof : Non, Ta-bâââ... Comme du tabac
Le Français : Du tabà ?
Le prof : Pas du tabà, du tabâ
Le Français : "Tabàrnàcle"
Le prof : Ha pis d'la marde
Le Français : "Plaît-il ?"
Le prof : Laisse-tomber
Le Français : Non, mais je l'avais le dernier
Le prof : Laisse-tomber !!!!

Pouvez-vous me dire pourquoi on se tue à vouloir que les Français sacrent comme "il faut" (comme si il fallait sacrer...) ? Pourquoi on ne s'en sacrerait pas ? Est-ce si poignant dans notre définition de notre identité culturelle ? C'est quoi l'enjeu d'un "tabernak" mou et francisé ? Est-ce que les Parisiens nous donnent des cours de moue ? Non...

Nous sommes aller reconduire Jérôme à son train pour Lyon (à la Gare de Lyon... Je me demande s'il y a des trains qui partent vers d'autres destinations à la Gare de Lyon... Et en primeur, je pars à Berlin le 24 et 25 janvier pour aller visiter Greg et Alex. J'achète mes billets dès que je le réalise... Enfin, fin de la parenthèse) et nous sommes aller prendre un verre à deux pas de là. J'ai pris un chocolat extraordinaire... OMG !!! Je peux devenir diabétique, j'ai goûté au real european hot chocolate... Et juste 5 euros en plus ! (pour Paris, c'est comme trouver une batterie de cuisine chez Dollorama) Tout était en ligne pour en prendre un second... Un second... OMG !!! Deux chocolats ! J'aurais voulu faire une pub de lait : Un chocolat c'est bien, mais deux, c'est mieux...

Vincent a (encore) fait une petite crise d'hypomanie (c'est sans doute le sugar rush, car lui aussi a pris deux chocolats) et a décidé de se lancer dans l'organisation d'un colloque à Paris dans lequel je pourrais refaire ma présentation sur la sexualité des nains de jardin... Par la bande, il a décidé d'embarquer Van Troi Tran (qui, on se rappelle, a trois mois pour rédiger une thèse) ne lui laissant pas le choix... Je pense que Vincent s'ennuyait un peu... Ou peut-être que lui aussi prévoit relever le défi (par orgueil et/ou solidarité) de rédiger sa thèse en trois mois... En tout cas, c'était peut-être juste aussi une idée qu'on lance quand on a trop bu (de chocolats)...

J'ai quitté, il devait être minuit quand je suis arrivé... J'avais un cours le lendemain matin... Alors, je me suis couché, pour vrai... C'était la fin de mon jour le plus long...

Mais mon post ne doit pas se terminer ainsi, car je veux être certain qu'il sera le plus long... Je vais raconter le prochain jour, ou plutôt "le cour le plus long", quoiqu'il m'a paru passé plus rapidement qualitativement que le cours de mercredi... C'est un cours moitié ENS (École normale supérieure) et moitié EHESS qui se déroule dans un pavillon extérieur à Ulm... En fait, moitié/moitié, c'est pour les profs, car pour les étudiants, je n'en ai pas vu beaucoup de l'extérieur de l'EHESS... En fait, je ne sais pas quel est le code de lettres que les normaliens (remplis d'un aura de mystère) emploient... et c'est seulement ce code que je connais... C'était comique la présentation des étudiants : Je suis ________, étudiant en M2TT à l'EHESS... et ça, c'est seulement celui que j'ai noté... C'est près du SMS... Fait intéressant, nous n'étions que quatre étudiants étrangers sur une cinquantaine de présents...

Le cours était une sorte de révision express (quoique, qui dure 7 heures...) de mon baccalauréat... C'était hyper limpide et rapide... Et les profs citaient (à l'oral) autant d'auteurs que Patrick (à l'écrit... quoique je crois que Patrick nivelle par le bas quand il nous jase)... Et le plus impressionnant, c'est qu'à chaque fois que l'un en sortait un, l'autre l'écrivait sur le tableau blanc... C'était un spectacle quasi comique... Comme un quizz... Il y en avait des faciles (Boas, Cohen, Héritier, Clifford et Marcus, etc.), d'autres difficiles, mais facile tellement ils sont connus (Malinowski, Lenclud, Mauss, etc.), mais d'autres franchement difficiles (Robben, Cavell, Naeples, Crapanzano, etc.) Je me sentais à l'heure de vérité... Il ne manquait plus qu'une porte de garage qui s'ouvre devant deux spas et un drapeau de l'Argentine et de la petite musique stressante...

C'est le fun, car le cours fait vraiment un gros spotlight sur les travaux des doctorants français... Mais c'est tellement différent un doctorant français ! Ça porte du linge trop grand et ça encadre des propos super pointus dans un vocabulaire parfait entre deux "quoi"... En fait, j'en ai juste vu un... mais c'était toute une expérience... Ça manquait un peu de structure (le pauvre a dû couper une heure à son exposé...) mais c'était hyper stimulant au niveau de l'expérience de terrain.

Bon, bien c'est long écrire tout ca... chu tanné... Et je suis déjà en retard de un... donc...

2009-01-08

département des plaintes

Bon, je n'ai pas le temps aujourd'hui de composer mon blog... En fait, j'aurais eu le temps, mais Vincent Auzas m'a convaincu de prendre "un dernier verre" ou plutôt tasse. Je me suis en effet claqué ce soir non pas un, mais deux chocolats hyper gras (Jérôme, c'était un chocolat en ganache, meilleur qu'au Angélina, et Vincent m'a dit qu'il connaissait de meilleures adresses... Je vais mener mon enquête avant ton arrivée...) Alors, pour les plaintes, envoyez-lui vos hate-mails via Facebook... Il vous répondra sans doute avec joie...
Mais ne vous inquiétez pas, je mijote un post vraiment long qui s'intitulera "le plus long"...

2009-01-06

Les motons

Je suis bourre de motons... Je suis a l'aéroport et j' écris a partir de mon iPod touch. je suis seul. je pars a Paris pour 6 mois...
Quand mon chien est bourre de motons, Jerome la peigne... Ça existe un peigne pour l'âme ?
Mais Brie-mon-chien-Brie n'aime pas se faire peigner... Il faut lui donner des biscuits... j'en ai manger un tantôt au Tim avec mon amoureux, mais il me semble que j'en prendrais d'autres pour faire passer les motons... j' ai une boîte de meteos dans ma valise... Je devrai attendre la-bas pour retrouver mon (re)confort...