2008-10-21

mes gros cheveux

J'avais de gros cheveux, alors je suis allé chez la coiffeuse. Je dois avouer que la vraie raison, c'est que mon amie Garde Perron vient me visiter bientôt, et je ne voulais pas me faire appeler "gros cheveux" pendant une semaine. "Gros cheveux !" "Gros cheveux !" Ha non, je n'aurais pas supporté. Et de toute façon, je ne supportais plus mes gros cheveux. Ils étaient chauds, anarchiques, jaunis (je m'ennuie terriblement de mon shampooing bleu) et so out for Paris.

À la MEC, il y a deux clans : ceux qui se-laissent-pousser-les-cheveux-parce-qu'il-paraît-que-c'est-SUPER-cher-le-coiffeur-genre-30-euros-pour-une-coupe-au-clipper-fait-que-Oh-My-God-J'vas-tellement-attendre-à-Noël (la plupart sont pas pris avec des problèmes de gros cheveux), et ceux qui disent-voyons-donc-qu'est-ce-tu-dis-là-il-y-a-un-salon-de-coiffure-à-Porte-d'Orléans-qui-coûte-10-euros-la-coupe-simple. Vous l'avez deviné, j'ai adhéré au deuxième clan. Je suis donc parti cet aprème à l'aventure.

Dans mon très-conscient individuel, une coiffeuse (attention cliché droit devant) c'est une sorte de Marie-Mai blonde platine avec une anneau dans le nez qui "chic" de la gomme, qui soupire quand tu lui dis que tu veux pas qu'elle te fasse l'arrière au clipper et qui t'adresse la parole, 11 minutes après le début de la coupe parce qu'elle parlait de son chum avec sa collègue coiffeuse, avec un "Quel âge qu'tas, toé, pour avoère des ch'veux blancs d'même, hein ?". (Fin du cliché) Alors, je n'y allais pas d'un pas enjoué. En plus, mon iPod crachait de la musique inquiétante. Je suis entré dans ledit salon, mon air de Canadien piteux au visage. Je ne peux pas émettre de généralisation (comme les ascenceurs), mais j'ai tout de même été frappé par le contraste.

Au salon, il n'y avait pas de musique. Il y avait une petite coiffeuse chinoise qui se faisait engueuler par un Français mal engueulé et une moyenne coiffeuse franco-arabe (libanaise ?) qui se faisait engueuler par un hispano-francisé mal engueulé. Ha oui, il y avait aussi une fille avec du papier d'aluminium plein la tête qui lisait une revue de fille. Je ne sais pas ce qu'elle fait, elle, pour gagner sa vie, mais mon dieu qu'elle est tout le temps là, dans tous les salons de la Terre où je vais. J'étais un peu outré. Depuis quand on gueule après les coiffeuses ? Pauvres coiffeuses. 

Au début, j'hésitais : elles sont peut-être incompétentes (ce qui explique le bas prix) ou les clients sont peut-être bien chialeux... Ils étaient là à leur expliquer comment ils voulaient ça. Un a même arraché la brosse des mains de la coiffeuse... Quel spectacle ! Puis j'ai repensé à la chanson de Lynda Lemay chez le coiffeur, où elle subit le talent de la tantouze, et je me suis dit : ça se peut qu'ici (dans ce salon, voire à Paris) les coiffeuses soient simplement soumises... Celui qui donne (la préposée, le prof, le client, le spectacle, le serveur, etc.) a tous les droits sur celui qui reçoit. Celui qui reçoit les ordres doit obéir. C'est vraiment une joute constante de domination... 

Enfin, je n'ai jamais vu une coiffeuse aussi soumise. Elle ne me regardait pas dans les yeux, me demandait plusieurs fois par minute si la longueur me convenait, m'époussetait constamment pour ne pas que j'ai des cheveux sur moi, s'excusait sans cesse si elle faisait tomber un objet ou son portable sonnait. Mais le coup de grâce : elle m'a coupé à l'oreille avec le rasoir. Je n'ai rien senti, mais je saignais comme un con. J'ai cru qu'elle allait tomber sans connaissance, non par peur du sang, mais par peur de ma réaction. Je revoyais la scène de "Stupeur et tremblements", comme si j'étais au Japon. 

Je lui ai, je crois, donné le choc culturel de sa vie en lui répondant : "Non, mais il n'y a pas de soucis". Je la sentais fondre... Et les clients derrière moi qui attendaient se scandalisaient et protestaient. Elle voulait me laisser partir sans payer, mais juste pour la réaction des connards qui attendaient, j'ai non seulement payer mon dû, mais laissé un pourboire. J'ai semé la confusion. Heureusement.

La coiffure, c'est un métier à risque. On touche la chevelure de gens fiers... Pourtant, c'est un service, les coiffeuses devraient avoir le pouvoir de dominer. Au Canada, elles ont le droit de nous couper les oreilles en disant "oups", une gomme dans la bouche. C'est à se demander si ce n'est pas seulement parce que ce sont des femmes... Il y a un côté féministe qui me pousse ici, derrière l'oreille... 

4 commentaires:

Garde a dit...

C'est cool qui te manque une oreille Gros cheveux
Moi aussi je t'aime tu sais!!!
xxx

Anonyme a dit...

Wow! Cet article est du grand "Jocelyn à Paris", comme les posts du début. Cette façon que tu as de décrire le quotidien qui nous fait nous rouler par terre, c'est génial! Par contre, le sort des coiffeuses est pathétique à souhait dans l'Hexagone!

Anonyme a dit...

Hihi, j'ai failli m'étouffer avec mes céréales en lisant ton aventure! Wow, là, je seconde Jérôme : C'est vraiment du grand «Jocelyn à Paris»! Et la finale, wow! Quel constat sur nos différences, et quelle morale désopilante! Pauvre coiffeuse! T'as bien fait de payer et laisser du pourboire, ne serait-ce que pour voir la tête des autres!
Cath

Anonyme a dit...

Décidemment Jo, mon vote pour le post du mois va immédiatement à Gros Cheveux!!
C'est l'un de tes meilleurs! (avec celui sur les moues, évidemment!)
Mo xx